La France, souvent vantée comme la première destination touristique mondiale, se trouve aujourd’hui à un tournant décisif de son développement économique lié au tourisme. Alors que 100 millions de visiteurs étrangers ont été accueillis en 2024, le pays accuse un certain retard en matière de recettes, se plaçant au 4e rang mondial. Face à cette disparité, le gouvernement français, piloté par le Premier ministre François Bayrou, a établi un objectif clair et ambitieux : atteindre 100 milliards d’euros de recettes touristiques d’ici 2030. Cette volonté s’accompagne d’une série de mesures innovantes et d’une méthodologie repensée pour une croissance durable et inclusive du secteur. Le pari est double : dynamiser une activité clé qui représente 8% du PIB et 2 millions d’emplois non délocalisables, tout en visant une transition écologique exemplaire.
Les leviers clés pour booster les recettes touristiques à 100 milliards d’euros en 2030
Malgré une fréquentation record, avec 100 millions de visiteurs en 2024, la France peine à convertir cette affluence en recettes proportionnelles, occupante la quatrième position mondiale derrière des pays comme l’Espagne qui affichent pourtant moins de visiteurs. Cette situation découle notamment d’une durée de séjour limitée et d’une dépense moyenne peu élevée.
Le gouvernement entend donc s’appuyer sur plusieurs leviers stratégiques pour augmenter la valeur générée par chaque visiteur :
- Diversification des offres touristiques : en intégrant des segments porteurs tels que le tourisme sportif, d’affaires, l’agritourisme, ou encore l’œnotourisme, la France vise à étirer la saisonnalité et à toucher des clientèles variées.
- Simplifications réglementaires : pour permettre une meilleure réactivité des acteurs, un paquet de mesures sera mis en œuvre, allant par exemple jusqu’à la modification du droit par ordonnance afin d’accélérer la transformation du secteur.
- Plan logement des saisonniers : un plan spécifique sera déployé sur la période 2026-2028 pour résoudre le problème chronique de recrutement induit notamment par un logement inadéquat ou insuffisant.
- Digitalisation des services touristiques : l’adoption de technologies telles que les chèques vacances dématérialisés permettra une meilleure accessibilité via des plateformes comme Booking.
- Renforcement des infrastructures et transports : la SNCF, Air France et les réseaux urbains tels que Vélib jouent un rôle déterminant dans l’attractivité des territoires.
Ces axes d’amélioration s’inscrivent dans une ambition de croissance mesurée à hauteur de +30% d’ici cinq ans, ce qui permettrait d’atteindre les 100 milliards d’euros envisagés pour 2030. Cette trajectoire est saluée par des acteurs majeurs comme Accor, Club Med ou la Compagnie des Alpes, réunis au sein de l’Alliance France Tourisme, qui insiste cependant sur la nécessité d’une feuille de route détaillée, commune et opérationnelle.
Segmentation touristique | Objectifs clés 2030 | Mesures prévues |
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Tourisme Sportif | Augmentation de 20% des recettes | Développement d’infrastructures, événements internationaux |
Tourisme d’Affaires | Croissance de 25% du chiffre d’affaires | Simplification des procédures, modernisation des espaces |
Agritourisme et Œnotourisme | Diversification de l’offre | Création de circuits thématiques, facilitation des accès |
Tourisme culturel | Maintien au top niveau mondial | Investissements dans les sites et musées, innovation numérique |
La mobilisation de ces ressources passe aussi par une méthodologie révisée des indicateurs : l’Insee s’apprête à intégrer dans ses calculs toutes les dépenses liées aux activités de loisirs comme les musées, parcs d’attractions et visites de patrimoine, ce qui devrait affiner la valorisation économique réelle des flux touristiques.
Optimisation des infrastructures et services pour une expérience touristique enrichie
Avec 100 millions de visiteurs en 2024, l’attractivité de la France dépend fortement de la qualité des prestations et infrastructures mises à disposition des touristes. L’enjeu est désormais d’augmenter la dépense moyenne par visiteur grâce à une meilleure expérience globale. Plusieurs mesures sont engagées pour répondre à ce challenge.
Modernisation et digitalisation des outils d’accueil
Les plateformes de réservation et les services en ligne jouent un rôle clé dans la décision et le déroulement du séjour touristique. L’intégration des chèques vacances dématérialisés pour les achats sur des plateformes telles que Voyages-SNCF et Booking vise à fluidifier la consommation et à encourager des séjours plus longs ou plus fréquents.
En parallèle, des efforts sont consentis pour renforcer la connectivité locale et l’accessibilité :
- Développement des transports régionaux et interurbains par la SNCF pour relier efficacement les zones touristiques.
- Promotion de modes de déplacement durables comme Vélib dans les grandes agglomérations.
- Modernisation des aéroports et augmentation des liaisons aériennes par Air France afin de faciliter l’arrivée des visiteurs internationaux.
Un réseau d’hébergement adapté à la demande croissante
Le secteur hôtelier, représenté notamment par des acteurs comme Accor et Pierre & Vacances, intensifie ses efforts pour répondre aux attentes des touristes, notamment en termes de confort, de localisation et de durée des séjours.
Un défi majeur demeure cependant le logement des travailleurs saisonniers nécessaires au fonctionnement optimal des établissements. Le gouvernement a annoncé un plan dédié pour les années 2026 à 2028 afin de proposer des solutions adaptées et ainsi limiter les difficultés liées au recrutement.
Type d’hébergement | État actuel | Objectifs 2030 |
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Hôtels classiques | 65% occupation annuelle | Stabiliser à 75% et améliorer la qualité |
Résidences de vacances | 30% capacité utilisée | Extension de l’offre et diversification |
Hébergements alternatifs (Airbnb, etc.) | En forte croissance | Encadrement et intégration durable |
Ces améliorations permettront de mieux fidéliser les visiteurs et d’augmenter leurs dépenses totales, redynamisant ainsi tout un écosystème économique.
Par ailleurs, la promotion du tourisme dans des territoires moins connus mais riches en patrimoine naturel et culturel, telle que la région de Bordeaux avec son portail Bordeaux Tourisme, est également à l’ordre du jour. Ces initiatives visent à équilibrer la fréquentation et à valoriser les ressources locales.
Stratégies innovantes pour attirer et fidéliser les clientèles internationales
En dépit d’une fréquentation élevée, la France doit relever un défi majeur pour espérer atteindre ses objectifs : l’augmentation des recettes touristiques par touriste. Ainsi, le gouvernement mise sur une politique ciblée pour attirer des visiteurs à forte capacité de dépense, notamment par la diversification de la clientèle internationale.
Facilitation des visas et accueil privilégié des groupes
Une priorité est donnée aux touristes chinois, dont le nombre a fortement chuté suite à la pandémie, avec seulement 1,1 million de visiteurs en 2024 contre 2,2 millions en 2019. Sachant que cette clientèle générait près de 3,46 milliards d’euros de recettes, la perte est conséquente.
Pour inverser cette tendance, le gouvernement prévoit d’automatiser les demandes de visas pour les groupes, simplifiant ainsi grandement l’accès à la France. Cette mesure, conjuguée à des campagnes promotionnelles coordonnées par Atout France, entend relancer la fréquentation et les dépenses de cette clientèle essentielle.
Multiplication des offres thématiques et expériences authentiques
Le développement du spiritourisme ou tourisme de dégustation de spiritueux illustre cette dynamique : en assouplissant les règles régissant ce secteur, la France souhaite valoriser son savoir-faire et prolonger les séjours dans des régions viticoles et distilleries.
L’offre touristique est également enrichie par la promotion du tourisme d’affaires et des événements sportifs, secteurs considérés comme des moteurs importants de croissance.
- Tourisme d’affaires : facilitation des congrès, salons et séminaires grâce à des hubs comme la Compagnie des Alpes.
- Tourisme sportif : croissance attendue par l’organisation d’évènements internationaux avant les Jeux olympiques d’hiver 2030.
- Tourisme patrimonial et culturel : valorisation des sites grâce à la collaboration avec l’Office de Tourisme de Paris et des régions.
Clientèle cible | Chiffre d’affaires 2019 | Actions prioritaires |
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Touristes chinois | 3,46 milliards € | Simplification visas, offre premium |
Touristes européens | Majoritairement loisirs | Accroissement mobilité SNCF, digitalisation |
Tourisme d’affaires & sportifs | En pleine expansion | Investissements infrastructures et événements |
L’ensemble de ces initiatives se traduit par une dynamique qui conjugue attractivité, simplicité et innovation afin de maximiser la dépense touristique. Elle illustre la volonté de la France de s’imposer non seulement par la quantité mais aussi par la qualité de son accueil.
En parallèle, les partenariats avec les compagnies aériennes, notamment Air France, et les réseaux ferroviaires SNCF, complétés par les services de mobilité urbaine comme Vélib, renforcent la chaîne d’accueil touristique, depuis l’arrivée jusqu’aux déplacements locaux.
Tourisme durable et inclusion : vers un label national et une empreinte carbone maîtrisée
Dans un contexte mondial où l’écologie devient un critère fondamental des choix touristiques, la France inscrit sa stratégie dans une dynamique durable. Celle-ci est d’autant plus importante qu’elle vise à faire du pays la première destination de tourisme durable au monde d’ici 2030.
Le label Tourisme et Handicap, un exemple d’inclusion sociale
Le gouvernement veut renforcer les dispositifs existants pour favoriser un tourisme social et inclusif. Le label Tourisme et Handicap cible une meilleure accessibilité des infrastructures pour les personnes en situation de handicap. Avec déjà près de 3.800 établissements labellisés en 2025, un objectif ambitieux est fixé à 10.000 d’ici 2030, doublant ainsi le nombre d’offres adaptées.
- Développement de services adaptés dans les musées et sites patrimoniaux.
- Formation accrue des personnels touristiques à l’accueil spécifique.
- Amélioration des infrastructures d’hébergement et des transports accessibles.
Stratégie nationale de décarbonation du secteur
Un autre volet majeur concerne l’empreinte carbone générée par le tourisme. Le ministère du Tourisme prévoit la publication imminente d’un indicateur permettant de mesurer et suivre cette empreinte. Cet outil sera la base d’une stratégie à partir de 2026 qui visera à réduire les émissions liées aux déplacements, hébergements et activités touristiques.
En outre, des dispositifs de financement spécifiques seront proposés via Bpifrance et la Banque des Territoires afin que les entreprises du secteur puissent investir dans des solutions à faible impact environnemental.
Axes de développement durable | Objectifs 2030 | Mesures associées |
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Accessibilité et inclusion | 10.000 établissements labellisés | Renforcement du label Tourisme et Handicap |
Réduction des émissions CO2 | Baisse progressive mesurée | Indicateur carbone, décarbonation planifiée |
Soutien financier vert | Prêts pour entreprises durables | Appui Bpifrance et Banque des Territoires |
Cette approche écoresponsable donne au projet gouvernemental une dimension stratégique alignée avec les attentes grandissantes des clientèles internationales et nationales. Elle permet aussi au secteur touristique de se projeter dans un avenir viable économiquement et écologiquement, conciliant performance et responsabilité.
Impacts économiques et sociaux attendus du projet de croissance touristique à 100 milliards d’euros
Le tourisme constituant déjà une part importante de l’économie française, son essor programmé à 100 milliards d’euros représente un levier puissant pour la croissance et l’emploi. Outre les recettes directes, ce secteur génère des retombées à plusieurs niveaux de la société et des territoires.
Création d’emplois locaux et non délocalisables
Avec près de 2 millions d’emplois liés au tourisme actuellement, la hausse envisagée devrait induire une croissance significative de la création d’emplois, particulièrement dans les zones rurales et périurbaines où l’agritourisme et l’écotourisme se développent. Ces emplois sont, par nature, peu susceptibles d’être délocalisés, renforçant la résilience économique locale.
Les actions sur le logement des saisonniers sont essentielles pour sécuriser les postes et répondre à la pénurie chronique de main-d’œuvre, qui freinait jusqu’ici le développement de la capacité d’accueil.
Effets économiques induits et dynamisation des territoires
Le projet s’appuie sur des investissements dans les infrastructures, les services, et la numérique, susceptibles de générer un effet multiplicateur favorisant l’ensemble des filières connexes :
- Restauration et hôtellerie améliorées, avec des chaînes comme Accor et Pierre & Vacances.
- Transports et mobilité renforcés, notamment par la SNCF et Air France.
- Activités culturelles et de loisirs amplifiées via l’implication d’acteurs comme le Office de Tourisme de Paris et Bordeaux Tourisme.
Indicateur économique | Niveau 2024 | Projection 2030 |
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Recettes touristiques internationales | 71 milliards € | 100 milliards € |
Nombre d’emplois dans le secteur | 2 millions | 2,5 millions |
Nombre d’établissements labellisés Tourisme et Handicap | 3 793 | 10 000 |
Ces perspectives se conjuguent avec les préoccupations économiques internes, notamment en matière de fiscalité et d’emploi. L’impact sur le PIB est significatif, stimulant des pans entiers de l’économie, comme l’illustrent certaines analyses sur les réformes fiscales 2025 ou les taux d’emploi des seniors (données 2025).
Enfin, le projet positionne la France comme un exemple mondial en conjuguant croissance économique, innovation et durabilité. Il combine ainsi des ambitions nationales précises avec une ouverture sur le contexte international (investissements en Europe) et un regard attentif sur les comparaisons internationales (tourisme américain).